Faire ses lacets au CP

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Faire ses lacets au CP

 Depuis que j’ai des CP, je me retrouve chaque année confrontée à un même souci qui me demande beaucoup de temps, de patience et d’énergie : les lacets.

Ma classe étant flexible, mes élèves peuvent travailler debout, sur des tabourets, sur des chaises et même au sol. Par souci d’hygiène et de confort, ils mettent des chaussons dès leur arrivée en classe.

Mais voilà !

Quand il faut ressortir dans la cour à la récréation, quand il faut aller à la cantine, quand il faut se rendre au gymnase ou quand il faut rentrer à la maison, mes élèves doivent remettre leurs chaussures.

Et là … Pour une maitresse de CP, en septembre, c’est l’angoisse !

En effet, peu d’élèves savent en général faire leurs lacets à l’entrée au CP. J’en ai parfois 2 ou 3 dans une classe mais rarement plus.

J’entends bien que certains disent déjà : « Ah non mais franchement ! Maintenant faut aussi qu’on leur apprenne à faire leurs lacets !!!! Mais c’est aux parents de leur apprendre ça ! Ils ne font donc plus rien ! »

Rassurez-vous ! Je ne souhaite obliger personne à enseigner le laçage en classe. Cet article est le résultat d’une réflexion purement personnelle et est une réponse à un vécu et à des difficultés qui me sont propres.

De plus, je comprends tout à fait ces remarques car je me disais la même chose … au début. Puis, un jour, au fil de la vie, je suis devenue maman … Et je me suis dit « Mais je vais devoir lui apprendre à faire ses lacets ! Comment vais-je réussir à lui apprendre ça un jour ?! J’ai déjà tellement eu de mal à l’apprendre moi-même étant petite ! Je revois encore toute ma famille passer à la maison pour essayer de me montrer. C’était l’horreur ! ».

Et puis, franchement … Que celui ou celle qui n’a jamais dit à son enfant « Allez viens là, je te fais tes lacets. On est déjà en retard, faut qu’on se dépêche ! Je te montrerai ça une autre fois. » me jette la première pierre. 😉 (Spoiler alerte : Je ne peux pas vous la jeter ! lol)

Mais rassurez-vous, de mon côté j’ai depuis pris le temps de le montrer à mon fils. 😉

Et de mon côté encore j’ai fais des recherches sur la motricité fine et j’ai découvert que les lacets, et bien ce n’est pas si facile que ça !! Ni à faire, ni à enseigner !!

La technique que je connaissais, que j’utilise personnellement et qui est la plus répandue apparemment n’est pas accessible aux enfants en terme de gestuelle avant l’âge de 8-9 ans (soit le CE2-CM1). En effet, faire ses lacets demande une dextérité assez importante et impressionnante ainsi qu’une suite de mouvements très précis, longue à retenir pour des jeunes enfants.

Donc, en résumé, si les parents ne le font pas, c’est aussi sans doute en grande partie parce que les enfants ne peuvent pas le faire ou encore parce qu’ils ne savent pas comment s’y prendre pour le leur apprendre. Et apprendre une chose à un enfant qui n’est pas en capacité de la réaliser quand, en plus, on n’a pas de notion pédagogique sur la dite chose, autant partir escalader l’Everest en tongs, au moins on verra du pays ! 😉

Toujours est-il, qu’un jour j’en ai eu personnellement RAS LE BOL de faire les lacets. Mon dos n’en pouvait plus ! Je perdais un temps considérable à le faire alors que j’avais des choses bien plus urgentes à réaliser pour ma classe, cela m’énervait et jouait sur mon état d’esprit en classe … Il fallait que je trouve une solution !

Alors, d’abord, j’ai tenté ce que j’appelle la méthode « pieuse ». C’est une méthode dont les effets sont plutôt aléatoires, rarement rapides et souvent invisibles. Ma grand-mère y avait souvent recours quand j’étais jeune alors bon … Je me suis dit « pourquoi pas ! ». Elle consiste à prier très fort, tous les dieux et saints existants de toutes les religions possibles et imaginables en demandant que, dans leur immense bonté, ils fassent en sorte que tous les élèves viennent en classe avec des fermetures éclairs ou des scratchs à leurs chaussures. En vain ! Les lacets étaient toujours présents ! Mamie avait plus le feeling que moi. Dommage !

Je restais donc seule face à ma dizaine d’élèves (minimum !) à qui je devais faire les lacets … 4 fois par jour … et ils ont deux pieds chacun (si, si ! Véridique ! Incroyable mais vrai ! ;-)). Après calculs, cela me faisait environ 80 lacets à faire sur une seule et unique journée de classe. (Du coup j’avais ensuite envisagé la méthode « Pinata » qui consiste à se fabriquer une corde avec les lacets des chaussures pour tenter d’abréger ses souffrances ! Malheureusement, je n’avais pas de prise adéquate pour accrocher la corde. Pas de bol ! Retour à la case départ ! ;-p).

Mais bon ! Je ne suis pas du genre à me laisser abattre et encore moins du genre à renoncer aux avantages des chaussons dans la classe !

J’ai donc décidé d’apprendre à mes élèves à faire leurs lacets !

Oui car en effet, il existe plusieurs techniques pour faire les lacets. Je souhaitais enseigner à mes élèves une technique qui soit non seulement rapide mais aussi efficace : hors de question d’opter pour une technique où les lacets pouvaient se défaire au premier match de foot !

Ainsi, après maintes recherches sur internet et d’innombrables vidéos Youtube visionnées sur le sujet, j’ai découvert une technique facile et résistante qui a un atout considérable : c’est la technique de laçage la plus rapide au monde !  (Une fois qu’on la maitrise super bien évidemment ! Mais ça je me cache de le préciser aux élèves. Faut bien mettre un peu de challenge non ?! ;-)).

Elle était présentée dans une vidéo faite par un ergothérapeute. C’était il y a un moment de cela et impossible de remettre la main sur cette vidéo aujourd’hui (je dois avouer que j’étais tellement ravie de cette découverte que j’ai vite éteint mon PC pour la montrer à toute ma famille ! ;-p).

J’espère pouvoir retrouver la source exacte. En attendant, je vous la montre en vidéo ci-dessous pour que vous puissiez vous rendre compte de cette technique qui a déjà séduit mes élèves et même mon fils !

Comment s’y prendre pour apprendre aux élèves à faire leurs lacets ?

Même si l’autonomie c’est super, je ne souhaitais pas vraiment que les enfants sachent faire leurs lacets dans leur intérêt propre. J’avais, en toute honnêteté, à ce moment-là, une volonté première qui était extrêmement égoïste : je souhaitais qu’ils sachent faire leurs lacets dans une seul but : faciliter MON quotidien ! C’est peut être méchant mais tant pis. C’est comme ça et je l’assume encore aujourd’hui ! (Rappel : 80 lacets par jour !!!!).

Pour tenter de résoudre mon problème, j’ai simplement « bloqué » une séance d’EMC (Pourquoi de l’EMC ? parce que faire ses lacets = être autonome = programme d’EMC !) en disant aux élèves que j’allais leur apprendre à faire leurs lacets. Je leur ai expliqué pourquoi en détaillant les mêmes arguments que je viens de vous énoncer (mal de dos, patience, temps …) et les élèves ont été ravis de cette décision ! Ils étaient enchantés et, à la fin, fiers d’eux !

Après avoir montré la technique à tous (j’ai projeté la manipulation sur le mur de la classe grâce à la caméra HUE), pour que chacun puisse s’entrainer, les élèves ayant des chaussures à lacets dans le couloir sont allés les chercher et les ont distribuées à leurs camarades. (Si jamais vous ne souhaitez pas que les élèves utilisent les chaussures des autres, un bout de cordelette ou de ficelle autour du pied peut tout à fait faire l’affaire ! ;-)). Pendant une heure, les élèves ont pu observer, s’observer, s’entraîner, se conseiller et, l’enjeu et la fierté aidant, rien n’a altéré leur motivation et ils ont recommencé encore et encore. Les élèves qui savaient déjà les faire ont pu découvrir une nouvelle technique et partager la leur avec les autres. C’était un véritable moment d’entraide et d’apprentissage par les pairs.

Les élèves ayant été très motivés par cette séance, j’ai laissé à leur disposition au centre de motricité fine une chaussure d’apprentissage comme celle-ci (Merci à ma super collègue pour la découverte ! ;-)).

Faire ses lacets au CP

Ils ont pu l’utiliser durant deux semaines, sur leurs temps d’autonomie, pour s’entrainer non seulement à faire les lacets mais aussi à gagner en rapidité (Ben oui ! N’oublions pas que c’est la technique le plus rapide du monde ! ;-)).

Bien sûr, cet apprentissage n’a pas donné lieu à une évaluation ou à une vérification quelconque de ma part.

Certains élèves utilisent cette méthode.

D’autres utilisent celle que leur famille leur a appris.

D’autres encore n’y arrivent toujours pas.

Mais, au bout du compte, après une heure d’EMC et des entraînement réguliers en autonomie, j’ai largement plus de la moitié de la classe qui parvient à faire ses lacets aujourd’hui. De plus, j’ai largement plus de la moitié de la classe qui est fière de ce grand pas en avant dans leur autonomie personnelle et quotidienne. Enfin, j’ai largement plus de la moitié de la classe qui peut venir en aide aux autres.

Mon dos est soulagé ! Mon temps est sauvé ! Ma patience est préservée ! Tout le monde y a gagné ! 😉

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